L’OURS OU LE CHIEN

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L’OURS OU LE CHIEN

 

Un patient âgé de 25 ans, qui manifeste des troubles psychotiques avec idées de références : on parle de lui ; sur les pistes de sport d'hiver, il entend des bribes de conversations qu'il attribue à son sujet… Ces troubles suscitent des questions qui le taraudent et, progressivement, de fil en aiguille, il tisse un réseau d'idées délirantes qui l'enveloppent. Je lui prescris un traitement adapté, neuroleptiques à petite dose, et je le suis en psychothérapie. A l'occasion d'une séance suivante, nous explorons ses phénomènes hallucinatoires et je le prie de me donner un exemple. Non sans quelques résistances ou réticences à livrer ses pensées intimes, il relate que : dernièrement, dans la rue, alors qu'il déambulait, il entendit une bribe de conversation entre deux personnes où il était question de chien ; il prend ce propos pour lui « au pied de la lettre » : Sous-entendu, on le traite de chien. Alors me vint l’idée ou plutôt la fulgurance de lui demander : « imaginons qu’au lieu de chien, vous ayez entendu le mot ours » ; alors contre toute attente, il éclate d’un rire qu'il me communique, je comprends aussitôt que cet éclat de rire constitue la chute salutaire de l’échange. Effectivement, si le signifiant « chien » se prête au double sens, dont l'un des deux est péjoratif, tandis que le mot « ours », plutôt bon enfant, ne se prête pas au double sens. D'où la chute humoristique, qui signe la prise de conscience du sujet.

Deux semaines après lorsqu'il revient à la consultation, j'ai à ce moment-là à l'esprit, d'emblée, le moment sur lequel nous nous sommes quittés précédemment. Lui a oublié cet instant. Il n'y pensait plus. C'est important de le préciser. Alors je l'interroge : « Comment ça va » ? Il me répond tout de go, je vous le donne en 1000 : « ça va mieux, j'ai repris du poil de la bête ». Il n’y a pas meilleur remerciement à mon interprétation précédente. Cette petite vignette Clinique, en apparence anodine, dit beaucoup sur la conduite de la thérapie et sur la créativité, non contrainte, du thérapeute. Ce patient qui continue son suivi, m'explique qu'il ne présente plus de phénomènes persécutifs sous cette forme en ce qui concerne l'interprétation des paroles de gens dans la rue.

 

Par le Docteur Denis Bensoussan

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