« L’ODEUR DU VENT » GRAND FILM IRANIEN

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« L’ODEUR DU VENT » GRAND FILM IRANIEN


On est d’emblée envoûté par ce film étrange : la lenteur inhabituelle, les paysages colorés, un peu figés comme des décors de théâtre, des images de dessin animé ou des paysages de peinture ressemblant à des peintures de paysages, (on peut penser à Hopper), nous séduisent immédiatement.

On a pu cependant percevoir, au sortir de la salle, des réactions assez diverses et, même assez vives du public. Consultant après coup par curiosité les commentaires sur internet, on peut constater, ce qui est assez inhabituel, qu’il y a deux types de réactions bien tranchées et même complètement opposées : ceux qui ont adoré, et ceux qui ont trouvé le film d’un ennui mortel : lent, sans intrigue, répétitif, inintéressant au possible.

Le secret de ce film est qu’il peut, (qu’il doit ?) être interprété comme un conte, un conte philosophique, délivrant discrètement certains messages : Dans ce grand pays chargé d’une longue histoire aujourd’hui dans la main d’un régime épouvantable, la lenteur semble indiquer l’intemporalité, la permanence, l’irrévocabilité, de sa longue histoire. C’est ainsi du moins, qu’on peut le ressentir, dans cet Iran profond, rural et montagnard, loin du bruit et de la fureur de Téhéran, que d’autres films iraniens admirables nous ont parfois montrés.

Dans cet Iran lointain, profond, éternel, on est loin assurément du fanatisme religieux et de l’autocratie qui caractérisent aujourd’hui le régime de ce pays où il en faut assez peu pour avoir droit à la prison, voire à la corde… On en est loin ? encore que ! C’est qu’il faut être subtil si l’on veut exprimer une opinion dans ce pays, … et subtil, il l’est oh combien, ce film !

On ne connait que trop le sort et la place réservés aux femmes dans cette brave République Islamique…. Eh bien revoyons deux ou trois scènes de ce film : Un vieil homme assis demande de l’aide pour enfiler une aiguille. Avec sa bienveillance habituelle, l’électricien (personnage central du film) la lui fournit. Le vieil homme se met alors à repriser une chaussette qu’il tend ensuite à sa femme qui l’enfile. Banal ? Pas tant que cela ! car d’habitude, ne s’attend-ton pas à ce que ce soit plutôt la femme qui reprise pour l’homme ? …

- Autre scène, plus touchante encore : Un homme d’âge mur, malvoyant, demande de l’aide pour se rendre à un rendez-vous, sans aucune précision sur la nature de ce rendez-vous. L’électricien qui va de village en village dépanner les transfos électriques, l’aide non sans mal à traverser la rivière et le prend en voiture, puis s’arrête sur la demande de son passager pour cueillir un bouquet de fleurs, Oh un bien modeste bouquet ! mais n’est-ce pas L’INTENTION QUI COMPTE ? comme on a coutume de dire ? Il repart…puis on aperçoit au bout de la route une silhouette féminine qui se précise un peu en approchant, mais sans approcher trop cependant, discrétion oblige, laissant le passager descendre et rejoindre son rendez-vous… un rendez-vous galant pleine nature ! Voyez-vous ça, si c’est charmant !

Une troisième femme apparait dans le film. On ne la voit que très peu, mais c’est le seul personnage antipathique du film, agressive et butée, et elle nous apprend avec une sorte de fierté, qu’elle est… analphabète ! N’est-ce pas indirectement mais clairement rendre hommage à la Culture, qui caractérise ce pays si particulier et tellement différent de ses voisins arabes ou même turcs ?

Une autre scène est remarquable, et signifiante ! Alors que la voiture du héros, l’électricien, est en panne sur le bord la route, on voit venir de loin, je dis bien de loin, de très loin, un homme sur son âne, oui, sur son âne, … comme autrefois, n’est-ce pas ? Sans hésiter, il répare la voiture en panne et reprend son chemin, sur son animal : supériorité de la vie traditionnelle sur le monde moderne ?... On peut le voir ainsi.

Au total, conscience du temps long, bienveillance à l’égard du prochain et priorité à l’entraide, respect et réhabilitation de la femme, hommage à la culture, permanence de l’Iran, ou plutôt de la Perse éternelle, et tout cela, loin du tumulte de la ville, des ayatollahs et de leurs crimes. Et ce film ne serait pas politique ? (Au sens noble du terme bien sûr)

Oui ce film laisse rêveur, … et tant pis pour ceux qui se sont ennuyés pendant une heure et demie !


Docteur Jacques TEMKINE

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