« SUICIDE » CHEZ LES AGRICULTEURS

"SUICIDE" CHEZ LES AGRICULTEURS

Vu à la télé : Jérôme B., l’éleveur occitan initiateur d'un barrage des agriculteurs sur l'autoroute. Il s'exprime, s’extériorise dans les médias. Il a repris l'exploitation de son père qui s'est suicidé. Le "suicide" des agriculteurs, c'est l’occasion de l’évoquer à la manière de l'accident du travail, sans autre questionnement sur la dimension psychopathologique.

Le célibat, la solitude, la succession nécessaire des fils, par fidélité au père, l'arbre généalogique des agriculteurs est ici ou là, à différents paliers de générations, marqué de la croix du décès. Ici c'est le père, là c'est le fils, là c'est le petit cousin etc… par arme à feu ou par pendaison. La fréquence du "suicide" chez les agriculteurs est un fait connu. Ce qui est surprenant, c'est que le "suicide" très fréquent dans ce métier, véritable répétition symptomatique, transgénérationnelle est considéré banalisé, minimisé comme peut l’être un accident du travail, de la circulation ou la maladie professionnelle. Il ne manque plus qu'à inscrire le "suicide" des agriculteurs dans la liste des maladies professionnelles. Je blague… vous l'avez compris.

La souffrance psychique, transgénérationnelle, les secrets familiaux, le surmoi familial avec l'obligation de succession pour conserver le patrimoine agricole familial, tout cela est peu évoqué dans les médias, ça ne fait pas le buzz. Surtout l'agriculteur est taiseux. Il parle peu de lui, et parfois son expression est frustrée. Je me souviens de l'émission de téléréalité qui mettait en scène des agriculteurs, vieux garçons, qui cherchaient femme. L'émission a fait long feu.

Dr Denis BENSOUSSAN

 - Psychiatre, Psychanalyste